Mon parcours de formation professionnelle ou d’études supérieures, Diana témoigne (23 ans)
vendredi 21 juin 2013

Vous pouvez aussi témoigner si vous le souhaitez à ce questionnaire témoignage

Je suis  : Une femme
Je m’appelle (prénom fictif ou pas) : Diana
Votre âge ?  : 23 ans
Où habitez-vous actuellement (département ou ville) ? : 94

Votre IMC se manifeste comment ?
Le syndrome de Little se manifeste par un problème neurologique caractérisé par une difficulté à la marche due à certains muscles qui n’ont pas grandis correctement.

Indiquez la formation professionnelle ou les études supérieures entreprises ?
BTS et diplôme d’état.

Racontez-nous votre parcours
En fin de terminale SMS, j’avais plusieurs options d’études supérieures car j’avais un bon livret scolaire qui me permettait de postuler dans plusieurs filières et écoles. Néanmoins, j’étais persuadée d’une chose : je ne voulais pas aller à la fac. Je voulais une formation de courte durée (BAC + 3 minimum) qui me permettrait d’accéder à la vie active rapidement. Le BAC SMS m’a fait côtoyer le social et le médical (infirmière) mais il m’a confirmé mon attirance pour l’aide à la personne. J’ai donc décidé de m’inscrire en DUT carrière sociale et en BTS en économie sociale et familiale car je ne voulais pas passer par la phase des concours d’entrée des écoles d’assistante sociale. Je ne voulais pas rester inactive pendant un an. Je fus prise en BTS ESF dans une école parisienne.

Malgré l’aspect technique du BTS, les cours m’intéressaient. J’ai dû mettre en place une organisation personnelle pour pouvoir tenir le rythme demandé tout en modulant ma fatigue. Encore une fois, je mettais mon projet professionnel comme élément central de ma vie. Je me disais que c’était juste 3 années de compromis. Mon éducatrice m’avait soumis la possibilité de passer les épreuves de BTS sur plusieurs années pour éviter un surmenage. J’ai réfléchie à cette éventualité mais j’ai décidé tout de même de passer toutes les épreuves la même année. Je m’en sentais capable même si j’ai eu des gros moments de fatigue, de découragement, de doutes. Je rattrapais vite le dessus car j’étais entrainée par cette ambition de réussir pour accomplir ce projet. J’étais persuadée depuis plusieurs années que j’avais survécu pour pouvoir aider l’autre et que mon histoire de vie pouvait apporter quelques choses à la société. Cette idée était peut être idéaliste mais elle m’a encouragé à avancer dans mes choix, tout d’abord en étant bénévole, en écrivant des témoignages mais aussi que mon vécu et celui de mes proches m’ont montrés que beaucoup de personnes ne connaissaient pas ses droit ; restent dans l’incompréhension dans certains évènements de la vie. Il est important d’avoir des professionnels compétents qui puissent les guider, les accompagner dans leur projet de vie pour leur donner le courage d’avancer.
Mes efforts furent récompensés car j’eu mon BTS du premier coup avec une bonne moyenne. En parallèle, j’ai réussi à rentrer dans une école pour préparer mon diplôme d’état de conseillère. Ma dernière année fut aussi intense que les deux précédentes mais cette fois-ci l’objectif n’était plus le même. Ce fut la dernière étape avant d’accéder à la vie active, c’était les dernières cartes à jouer : montrer qu’on avait le mental et les compétences pour être le docteur des maux sociaux.
J’ai dû encore puiser dans mes ressources de courage pour pouvoir moduler l’énergie qu’on nous demandait entre les compétences théoriques et pratiques et la fatigue qui pouvait me freiner.
Avec le recul, je ne sais pas comment j’ai fait pour tenir le rythme que j’infligeais à mes jambes. Entre mon école, mes trois lieux de stages, les passages à la bibliothèque, le travail personnel à fournir, le permis de conduire. Résultat de ces 3 années intenses : Réussite scolaire, régime gratuit mais peu de loisirs.

Avez-vous bénéficié d’une aide ?
Durant mes deux années de BTS, j’ai toujours eu une prise en charge des taxis même pendant ma période de stage. Néanmoins en 3ème année ce ne fut plus possible étant donné qu’une prise en charge ne pouvait pas prendre en compte ma longue période de stage sur 3 sites. Étant donné que ce stage m’était nécessaire pour valider mon diplôme et que les autres possibilités de transporteur étaient inadaptées à mon projet professionnel, je n’ai pas eu un autre choix que de prendre les transports en commun comme toute personne ordinaire. Ce choix ne fut pas facile à prendre car qui me connaissait savait que les transports en commun pouvaient être considérés comme une phobie pour moi. J’avais peur d’être bousculée, de tomber. Je pris mon courage à deux mains, je n’avais pas le choix. Je cavalais dans les transports parisiens pour aller à l’école, en stage, à l’auto-école. J’ai dû m’adapter à ce rythme, adopter les bonnes attitudes pour éviter de me fatiguer (choisir un trajet où il y a peu de marche, éviter de faire trop de changements, me mettre proche des portes pour descendre du train en sécurité, sortir en avance pour pas me presser…). Le gros point positif, c’est que j’ai gagné en autonomie. Je n’attendais plus mes sœurs ou mes parents pour sortir, j’aimais pouvoir cavaler d’un endroit à l’autre sans attendre, demander à quelqu’un. Ne plus me cacher derrière cette phobie. Cela me donnait aussi la volonté de pouvoir passer ce permis adapté car je savais que les transports en communs avaient une limite pour moi. Même si je n’avais pas accepté de passer les examens en plusieurs fois, j’utilisais tout de même le tiers temps qui me permettait de passer les épreuves à mon rythme sans que la fatigue ne me freine. On a dû également adapter mon épreuve de couture car il avait été constaté qu’il m’était difficile d’utiliser une machine à coudre à cause de la pédale. Je ne fus notée que sur la partie théorique car je ne voulais pas de traitement de faveur par rapport à mes camarades.

Avez-vous rencontré des problèmes avec l’accessibilité ?
Mes deux écoles avaient un ascenseur même s’il pouvait être petit ce qui me permettait d’accéder aux étages. Pour éviter les allers et venues pendant la pause déjeuner je ramenais mon repas pendant mes deux années de BTS.

Vos contacts avec les autres

Les profs, les ami(e)s, votre intégration ?
Mes professeurs me traitaient comme les autres élèves et essayaient de répondre au mieu à mon besoin de tiers temps sans que cela ne fasse une différence avec mes camarades. Deux fois j’ai eu un incident : avec une tutrice de stage et un professionnel en dernière année, car elles ont mis en doutes mes capacités de faire ce métier étant donné que j’avais un handicap moteur. Plus on me met des barrières plus je me surpasserais pour montrer que les personnes avaient tort, surtout qu’on se permettait de mélanger mes compétences avec mon vécu. Si j’avais décidé de faire ce métier, c’est que j’avais accepté ma différence, j’avais construit mon histoire. Mon éducatrice me disait souvent que j’avais une capacité à prendre du recul sur les choses, prendre les bons côtés de mon vécu pour les transformer en force et d’apprendre des échecs pour pouvoir se relever facilement. Comme je le dis souvent, personne ne fait du social par hasard….
Les barrières que j’ai pu avoir m’ont juste confirmées mon projet professionnel et ont alimentées mon ambition de réussite. Mon handicap ne m’empêchera pas de faire du social : de conseiller, aider, accompagner les personnes même si je préfère ne pas intervenir avec un public ayant un handicap moteur car je ne veux pas prendre le risque qu’il y est un effet miroir entre les deux parties.
Seule la personne peut sentir si elle se sent capable de faire ou pas quelque chose. Le handicap ne doit pas être un prétexte pour ne pas réaliser ses rêves. Avec des ajustements tout est faisable. Moi j’ai eu la chance de réussir sans redoublements mais je n’aurais jamais lâché même si j’aurais dû redoubler.

Vie professionnelle

Êtes-vous entré dans la vie active ?
Aujourd’hui je suis conseillère en économie sociale et familiale depuis 2 ans dans le secteur privé. Je ne suis pas sur un poste reposant mais actif comme j’aime où la routine n’existe pas. Je vis le quotidien de personnes ayant des histoires de vie diverses et variées. Beaucoup de personnes me disent courageuse de faire ce type de métier en sachant mon histoire de vie. Malgré que mon handicap soit stable je dois faire face comme tout le monde à certains obstacles de la vie. Je ne fais pas ce métier pour le mérite ou autre mais parce qu’il correspond à ma personnalité. Pour le moment je n’ai jamais eu de paroles déplacées de la part des personnes que j’accompagne concernant ma façon de marcher. Leur questionnement peut parfois se baser sur mon âge car mon visage ne cache pas mon jeune âge. Je pense qu’ils se doutent que je n’ai pas eu une vie facile mais il ne me pose pas la question. Je ne considère pas que je suis passée derrière la barrière où maintenant c’est moi qui aide, je mets à contribution mes compétences et mes connaissances pour des personnes qui en ont besoin mais je vous rassure j’apprends tous les jours d’eux car chaque personne est différente donc je me personnalise selon la personne que j’ai en face de moi. Malgré que mon poste me plait, je vais tenter en parallèle les concours de la fonction publique, rien ne coûte d’essayer. Je veux toujours voir plus loin. J’avais beaucoup pensé à faire de l’humanitaire mais je suis très attachée à ma famille surtout à mes nièces donc c’est un projet que j’ai mis de côté pour le moment.
J’ai enfin réussi à avoir mon permis adapté, je pense que c’est le combat le plus intense dans la durée que j’ai eu. Cela a été un investissement financier mais surtout moral. Devoir passer par plusieurs étapes : les examens médicaux pour l’aptitude, la commission médicale de la préfecture avec ses obligations, l’auto-école à 1 h de chez moi ; le prix des leçons, le stress et après l’obtention, l’étape de l’achat de la voiture et de son aménagement. Ce combat a été nécessaire car je sais que je dois économiser au maximum mes jambes et les transports en communs sont pour moi plus fatiguant que les bouchons.

Un dernier mot

Que souhaitez vous dire tout simplement...
La société fait que le handicap fait peur, qu’on pense que la personne n’est pas compétente ni intéressante mais ces préjugés reflètent en loin la réalité. Les personnes avec des difficultés quelque qu’elles soient ont une rage de vivre, une ambition qui leur permettent de se surpasser. Comme tout le monde, elles apprennent de leurs échecs mais surtout il ne faut pas que la frustration s’installe inutilement. Leur vécu peut également apporter aux autres. Je suis consciente que ma personnalité est le résultat de mon expérience de vie et de mon éducation. Mes proches ont été les premiers à croire en moi et ils ont été les premiers à m’encourager dans les moments difficiles, dans les moments où j’avais besoin de sauter face aux obstacles. Je ne les leur remercierais jamais assez. Aujourd’hui je vois leur fierté dans leurs yeux quand il voit que les efforts de toute la famille ont été récompensés pour que je puisse avoir une vie « quasi normal ». J’ai réussi à faire les études que je voulais tout en prenant en compte mon souci de santé. Certes je suis très fière de pouvoir exercer dans le métier que j’aime mais ma plus grande réussite est ma santé. Quand on me dit que je suis un cas rare dans la récupération de séquelles que j’ai pu avoir à la naissance, c’est un leitmotiv pour mes projets professionnels, personnels. Mon vécu à un impact de près ou de loin sur les gens qui m’entourent et j’espère que mes témoignages répondront aux questions ou bien qu’ils changeront les mentalités.

Nous vous remercions de votre témoignage Diana.